ET C'EST PARTI !

Publié le par Nawa

Journal l’Humanité

Rubrique Société

Article paru dans l’édition du 16 mai 2007.

Société

La génétique enrôlée dans la chasse aux sans-papiers ?

Droits de l’homme. En marge de toute légalité, des policiers de Bobigny ont tenté d’obtenir un fichage génétique d’étrangers qu’ils avaient arrêtés pour défaut de papiers.

Le candidat président a prévenu : il faut balayer le « politiquement correct ». Est-ce en vertu de ce slogan que des officiers de police judiciaire de Seine-Saint-Denis se sentent aujourd’hui autorisés à pratiquer, en toute illégalité, des prélèvements d’ADN sur des étrangers arrêtés pour infraction à la législation sur les étrangers ?

Le vendredi 11 mai, au tribunal de grande instance de Bobigny, la juge des libertés et de la détention s’est retrouvée devant trois dossiers de demande de maintien en rétention de trois personnes arrêtées en même temps lors d’un contrôle d’identité, de nationalités différentes, avec des bons de commande d’analyse ADN à partir de prélèvements buccaux effectués lors de la garde à vue.

« Pour faire des rapprochements »

Dans son procès-verbal, l’officier de police judiciaire expliquait qu’il avait « informé le prévenu qu’un tel prélèvement sera effectué sur sa personne afin d’alimenter le fichier national informatisé des empreintes génétiques ». Interrogé sur la finalité de cette opération, il a simplement répondu « pour faire des rapprochements ». La juge n’a pas obtenu de réponse à la question qui s’imposait : « Avec quoi ? » En conséquence, elle a rendu une ordonnance qui stipule dans ses attendus que les articles de la loi « n’autorisent de telles opérations, attentatoires aux droits de l’homme, que dans le cadre strict des délits et crimes énumérés à l’article 756-55 du Code de procédure pénale, qui ne vise pas l’infraction à la législation sur les étrangers ici poursuivie ».

Deux des avocats reconnaissent que c’est la première fois qu’ils sont confrontés à cette situation. Selon l’un d’eux, il s’agit d’une « erreur », de « négligence », voire « d’ignorance », sans intention de nuire.

En matière de fichage des étrangers, la police dispose du fichier de gestion administrative des dossiers des ressortissants étrangers en France (AGDREF) sur la validité et la régularité des titres de séjour, de celui des personnes recherchées (FPR), de celui des hôtes étrangers, de celui des données biométriques des demandeurs d’asile, des réfugiés et apatrides.

Le 18 août 2006, un arrêté du ministre de l’Intérieur ajoutait le fichier informatisé des étrangers en situation irrégulière, ELOI, pour conserver pendant trois ans après les expulsions les noms, dates et lieux de naissance, photographies d’identité, langues parlées, famille, amis, hébergeants, visiteurs en centre de rétention... des expulsés. Retoqué par le Conseil d’État le 12 mars, sa révision a aussitôt été demandée par le ministre.

L’air du temps quelque peu délétère

Il y a, aussi, toutes les connexions aux fichiers européens sur les demandes de visas d’entrée, les soupçons de terrorisme... Aucun ne concerne, pour l’instant, les empreintes génétiques.

La « négligence » policière ne relèverait-elle pas, plutôt, du plus vil des amalgames ? De l’air du temps quelque peu délétère ? Ou, pire, de l’anticipation ?

Émilie Rive

jeudi 17 mai 2007

 

Publié dans Polytics

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L
J'ai bien peur, hélas, que ce soit le quotidien de demain !Et on voit qu'elles vont être les premiers à trinquer...
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C
qu'on ne me dise pas que ce n'est que simple enquête sociologique sur une population particulère, je hurle...
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D
à la saint-ELOI.. n est pas de papier en bois!
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